top of page

La Tripolarisation de la vie politique française

  • Photo du rédacteur: Nicolas Pellegrini
    Nicolas Pellegrini
  • 10 mai 2022
  • 7 min de lecture

Dernière mise à jour : 21 juin 2022


Introduction

Voilà un moment que je n’avais pas écrit, le temps d’accuser le coup de la présidentielle. Le second tour est passé, nous n’y étions pas, d’un cheveu (400 000 voix), je le regrette, mais un espoir renaît, le rapport de force étant ce qu’il est, Jean-Luc Mélenchon incarne la volonté du Peuple de Gauche : un besoin de rupture !

Avec la Nouvelle Union Populaire Ecologique et Sociale qui rassemble LFI, EELV, le PCF, et le PS, il y a la possibilité de chasser les macronistes de leurs circonscriptions aux élections législatives est d’imposer Jean-Luc Mélenchon comme 1er ministre, pour la retraite à 60 ans, le SMIC à 1400, 1 milliards de budget contre les violences faites aux femmes, et tant d’autres progrès, issus du programme l’Avenir en Commun.


Mais ce n’est pas le sujet de cette note de blog, car je veux me faire le témoins d’une restructuration inédite du champs politique dans notre pays. Une forme de tripolarisation est en marche, et je ressors donc un vieux schéma que j’avais travaillé en milieu d’année dernière, puisqu’il semble, que j’avais un peu d’avance sur mon temps...

Exit la bipolarisation de la vie politique française autour de 2 partis de gouvernements qui ont rythmé la vie politique française depuis des décennies, entre alternance et cohabitation, en passant par majorité et opposition. Les deux colosses aux pieds d’argile récoltent au soir du dimanche 10 avril 2022, respectivement 4,78 % pour Les Républicains (score de Valérie Pécresse) et 1,74 % pour le Parti Socialiste (score d’Anne Hidalgo). Soit un poids électoral de 6,52 % en cumulé.


Dans les analyses de la vie politique, c’est dans les années 70 que le terme de « bipolarisation » apparaît, pour théoriser cette opposition droite / gauche, qui n’est pas aussi simpliste, ni aussi manichéenne qu’on veut bien le croire. Car bipolarisation n’est pas « bipartisme », il faut préciser qu’au sein de la gauche pendant des années, deux blocs politiques se concurrençaient : le Parti socialiste d’une part, et le Parti communiste de l’autre. Également, à droite, deux blocs se disputaient le leadership : le RPR (ancêtre de « Les Républicains) et l’UDF (Les centristes).


Lorsque le RPR pour la droite et le PS pour la gauche ont fini par cornériser leurs alliés respectifs, ils ont dominé la vie politique, institutionnelle (qu’elle soit locale ou nationale), et médiatique française.


La Tripolarisation

La Tripolarisation est, de facto, une forme de clarification. Car elle émerge par le déplacement des clivages, et l’évolution des grilles de lectures politique. La stratégie populiste (au sens strict du terme) a contribué à faire émerger les trois blocs qui s’opposent au lendemain de l’élection présidentielle : Le populisme étant une stratégie rhétorique du « nous » contre un « eux », force est de constater que les trois blocs en question utilisent, de différentes manières, cette façon de faire.

- Un populisme de droite théorisant un « nous » ; le peuple français de souche ; et un « eux » ; les élites immigrationnistes et les immigrés

- Un populisme libéral / du centre, théorisant un « nous » le peuple faussement progressiste, face à un « eux » ; les nationalistes

- Un populisme de gauche, théorisant un « nous » Le peuple, les 99 %, face à un « eux » élitiste, oligarchique concentrant les puissances de l’argent.


Dans les partis traditionnels, les courants politiques ont toujours existé. De plus, l’hégémonie de ces derniers (PS / LR) sur leurs familles respectives, a permis à ces immenses partis d’avoir en leur sein des lignes radicalement opposées (il n’y avait qu’à voir l’écart qui séparait au parti socialiste, l’aile gauche, de son aile droite). Ces visions radicalement opposées ont amené à un éclatement idéologique, car aucun parti ne pouvait se gausser d’avoir une colonne vertébrale idéologique claire.


Un double phénomène a accompagné l’élection d’Emmanuel Macron en 2017 :

→ D’une part, le rassemblement de vision similaires appartenant à deux partis, semble-t-il, opposés. Car en rassemblant dans un même bloc de « centre libéral » l’aile droite du parti socialiste, et l’aile sociale des Républicains.

→ Mais également un phénomène de scission avec les partis traditionnels dans la volonté de créer une « troisième voie » : qui s’est traduite par un départ de Jean-Luc Mélenchon du PS, pour affirmer une ligne plus à gauche, et le départ (moins visible) de cadres de droite, chez le Front National qui a initié il y a quelque années une stratégie de dédiabolisation.


Tous ces éléments rassemblés amènent à penser qu’il y a une tripolarisation de la vie politique avec d’une part ce qu’il reste des partis de gouvernements, rassemblés dans un bloc central libéral, d’autre part, un bloc populaire composé de la gauche de rupture qui s’est émancipée de sa tutelle du parti socialiste, qui quant à lui, est défait, et un bloc identitaire composé de partis alliant l’extrême droite traditionnelle à des courants de la droite dites « républicaines » voulant chasser sur le même terrain en adoptant un discours de rejet, et xénophobe.


On le voit avec les discussions qui ont lieu, cette tripolarisation va favoriser les dynamiques d’alliance et d’union pour intégrer un pôle : car tout parti ou candidat qui ne se reconnaîtrait pas dans un de ces pôles se retrouverait rapidement marginalisé : de plus il est complexe de correctement définir ces pôles (adopter une définition sociologique, politique, électorale, historique?), car l’électorat est miscible dans chacun d’entre eux : il suffit de voir les élections intermédiaires où des partis faisant de bons scores à l’échelle nationale étaient moins performant localement, comme le Front National : car le sentiment d’appartenance se mesure à l’échelle d’un pôle plutôt qu’à l’échelle d’un mouvement ou d’un parti politique.


Une question se pose alors sur la colonne vertébrale politique : les clivages ne disparaissent pas, mais se restructurent, c’est la clarification évoquée à la première ligne de cette note : la gauche hypocrite, libérale finit chez Macron, et les plus identitaires de la droite républicaine finissent au FN, ou chez Zemmour. La caractéristique principale de cette restructuration se résume aux discussions qui ont lieu pour les élections législatives entre différents mouvement à gauche, qui font naître quelques dissensions que l’on peut résumer à deux lignes antagonistes : « Plutôt Macron ou plutôt Mélenchon ? ».


Les pôles se confondent (voir schéma 1) bien que les projets politiques soient quant à eux radicalement distincts ! Cela peut avoir pour conséquence une volatilité de l’électorat déjà très prononcée. Il est difficile de savoir si cette volatilité serait un avantage ou un inconvénient, car si volatilité il y a, il n’y a pas à hésiter pour tenter de convaincre un électorat historiquement rattaché à a gauche (ouvriers des zones rurales et industrielles) s’étant rabattu sur l’extrême droite du fait de l’abandon de ces classes laborieuses par une gauche qui aujourd’hui, s’assume libérale, chez Macron et qui récolte ce qu’elle a semé (voir score du PS). Cet électorat, fâché mais pas facho est à reconquérir, car les 40 années de séduction des discours d’extrême droite trouvant le coupable idéal et accessible (l’immigré) nous laisse une marge de manœuvre pour faire un travail de fond et de conviction : notre responsabilité est de les convaincre que les coupables directs de leur situation (désindustrialisation, chômage, insécurité, précarité, inégalité territoriale, destruction de services publics…) sont les politiques néolibérales.



Schéma 1

Se posera donc une limite à cette tripolarisation : le système institutionnel , qui favorise le partage (du fait de son fonctionnement à deux tours) de l’électorat en deux (bipolarisation). En consolidant ces trois pôles, peuvent se renforcer l’hypothèse de nombreuses triangulaires et donc d’incertitude quant au résultat des urnes le soir du premier tour (12 juin) des élections législatives. En effet ces élections à deux tours favorisent les profils centristes, consensuels, puisque ces profils ont vocation à attirer la droite comme la gauche (d’autant plus s’ils se retrouvent au second tour face à un ennemi tout aussi consensuel, tel que l’extrême droite), mais il y a là une faille : le rassemblement de la Nouvelle Union Populaire Écologique et Sociale pourrait faire pencher la balance en faveur du progrès social et humain.


La tripolarisation est une réhabilitation du clivage gauche droite, car la clarification qui a lieu dans les partis « traditionnels » qui comprenaient plusieurs lignes (une de droite et une de gauche) en leur sein, sont maintenant foulées du pied, et les éléments qui ne savaient plus où ils habitaient savent désormais que leur place n’est pas dans un pôle qui ne défend pas leurs valeurs. Le pôle populaire qui se construit autour de la France Insoumise, de son programme, et de Jean-Luc Mélenchon (qui entre en campagne pour devenir premier ministre d’une majorité de cohabitation) renoue avec la gauche traditionnelle, ambitieuse, en rupture, ne voulant pas accompagner un monde qui part à la dérive du point de vue des inégalités, de l’économie, ou pis, du vivant.


Face à ce bloc populaire, se tient deux autres blocs, l’un de droite libérale, l’autre de droite réactionnaire, se servant l’un de l’autre, comme les deux faces d’une même pièce d’or : celle des riches.


Photo 2

La construction politique des « pôles » se caractérise par des figures ultra-incarnées (voir photo 2), c’est le risque principal de la Vème République, les idées ne peuvent qu’être personnifiées en la personne de leader charismatique : c’est la rencontre (tant théorisé) d’un Homme ou d’une Femme avec un Peuple.

Pour autant le pôle populaire est le seul voulant rompre avec cette hyper présidentialisation, du fait de sa volonté de changer les institutions pour instaurer une 6ème République et une Assemblée Constituante qui en établira les règles de manière démocratique. Ce pôle populaire personnifié qu’incarne Jean-Luc Mélenchon est donc, sans conteste, le plus cohérent politiquement.


Pour conclure, les prochaines semaines seront décisives dans la vie politique de notre pays, qui va de surprises en surprises. L’Union Populaire a rappelé qu’en politique, tout était possible pour peu que les convictions et les combats étaient clair : nous sommes la rupture avec l’ordre établi, celui des riches qui opèrent une prédation sans nom sur les êtres humains et la nature.

Une tripolarisation va s’installer dans le pays, et il faudra composer avec cette nouvelle grille de lecture, qui fondamentalement, n’est pas compatible avec notre système institutionnel et électoral.





Nicolas PELLEGRINI

Chef de file "La France Insoumise" de la Sixième (6-ème) circonscription du Gard

Comments


Post: Blog2_Post

©2020 par Nicolas Pellegrini. Créé avec Wix.com

bottom of page